On croupissait depuis cinq jours en taule ! Considérés comme des traîtres à la nation, au pain sec et à l’eau. Bon j’exagère. La pitance était correcte mais aucune info ne nous parvint durant notre incarcération. Bon, de temps en temps, on se prenait un peu la tête entre nous se renvoyant la faute de cette situation misérable. Sarfath avait beau hurler que c’était une honte de nous emprisonner, le geôlier ne connaissant que dix mots de vocabulaire, les conversations furent vite limitées. Personne ne semblait s’inquiéter de notre sort…

Bénélis, elle, récupérait lentement. Elle avait été salement amochée lors de l’attaque contre Wasmeier. Une saloperie de piège à ours lui avait broyé une jambe. Les miliciens nous accompagnant l’avait retrouvée inconsciente et l’avait alors secourue. De son côté, Heinrich avait essayé d’arrêter le fuyard. Il nous raconta les détails à sa manière avec des « gros boums » et des « un truc de dingue ! » car il fallait avouer que la sortie de la cité du Seigneurs des Lois fut explosive. Bon moi ce que j’en retenais d’essentiel, c’était la présence de ses deux acolytes, un grand maigre basané et un petit trapu style ranger, attendant à la sortie de la ville le maître de la Main Pourpre. Ces trois là s’étaient ensuite fait la malle détruisant un des ponts d’accès de la cité.

Lorsque la porte de notre cellule s’ouvrit et qu’on nous sortit de notre trou à rats, ce fut pour qu’Herlich nous présente les plus plates excuses du Graf. Il se chargea de nous expliquer qu’étant « nouveaux en ville » et impliqués dans tant d’événements allant jusqu’à notre intervention, même salvatrice, dans la tentative d’assassinat du Graf, il avait bien fallu enquêter sur nos personnes. Et blablabli et blablabla. De toute façon, trop tard pour faire machine arrière. On protesta pour la forme mais il fallait bien continuer à faire avancer les choses. Pour nous prouver leur sympathie et leur confiance tout neuve, ils nous nommèrent Chevaliers Panthères, titre honorifique des gardes spéciaux du Graf. Tous acceptèrent sauf Bénélis qui visiblement l’avait colère sur ce coup là. De toute façon, nous avions intérêt à coopérer avec l’autorité de Middenheim car il y avait encore du nettoyage à faire.

Très rapidement, nous fîmes tomber tout ce qui touchait à la Main Pourpre. Grâce aux documents récupérés chez Wasmeier ce fut chose facile. Seule une piste restait obscure. Les entrepôts de Glückstein, retrouvé mort quelques jours après notre petite rencontre, furent légalement repris par un certain Said El Areb. Mais cet étrange acheteur s’avéra suffisamment prudent pour qu’on ne puisse le rencontrer.

Il restait le cas Gothard. Très rapidement nous comprîmes qu’il avait pris le nom de Goebbels, le second de Sparsam le chancelier du Graf. De par sa fonction, il fut délicat de l’inculper. Le fils Wiggenstein avait couvert ses arrières depuis quelques années. C’est feue l’épouse du Graf, Anika Lise, qu’il l’avait pris alors d’affection. Mais la lettre que nous possédions le fit passer aux aveux. Et notre nouvelle fonction aida amplement. L’entourage du Graf nous faisait confiance. On avait pu compter sur des gens comme Herlich et Schutzmann. Là encore, on marqua des points, car Gothard préparait bien un coup fumant pour le prochain Hexentag. Sa perversion envers Slaneesh fut révélée au grand jour et il put jouir une ultime et dernière fois lorsqu’il se retrouva rapidement, le temps d’un procès en bonne et due forme, au bout d’une corde…

Cela nous prit quelques semaines, ce qui permit à ma belle de régler quelques affaires. J’appris d’ailleurs qu’elle avait ouvert un orphelinat à l’Ouest de la cité. Etonnant de sa part non ? Visiblement cette petite futée nous cachait souvent de bons côtés humanistes. Je sais que certains dans la bande ne voyaient en elle qu’une arriviste marchande ne pensant qu’à son propre avenir ou qu’une simple gestionnaire de nos ressources. Pour ma part, je ressentais bien plus de choses envers cette gamine. Même si elle ne parlait jamais de son passé, contrairement à la plupart d’entre nous, je commençais à sentir qu’il y avait une grande rupture entre celui-ci et ce que nous connaissions d’elle. Mais quoi exactement ? J’espère qu’un jour elle se livrera un peu plus. En tout cas, et visiblement ça crevait les yeux à pas mal d’entre nous, j’en étais dingue depuis quelques temps. Elle continuait à ignorer mes avances et semblait sans amuser. Mais ce petit jeu entre nous me faisait quand même bien marrer et son petit côté mutin me plaisait.

Mais bon, je m’égare…

Bref, une fois nos affaires réglées, Einrich le fils illégitime, mais apprécié, du Graf voulut nous recevoir. Ce dernier revenu de Kislev depuis un mois cherchait de bonnes pommes pour y retourner et apporter de l’aide au Tsar en personne ! Et visiblement cela arrangeait les autorités de nous envoyer là bas. Au point qu’ils mirent les fonds et la forme. Grassement payés, nous fûmes, pour ce voyage, nommés Ambassadeurs de Middenheim auprès du Tsar.

Bon on sentait bien qu’il était temps pour nous de quitter la Cité, et après s’être concertés, nous nous mîmes tous d’accord pour partir vers le Grand Est. L’hiver approchant, il fallait s’attendre à un voyage assez rude, mais encore une fois l’appel de l’aventure fut le plus fort. Le voyage dura deux mois sans de réels gros soucis. Nous partîmes pour la plupart à cheval et pour les non cavaliers en diligence, jusqu’à Talabheim où nous prîmes le bateau jusqu’à Kislev.

Ces nouvelles contrées nous permirent de découvrir les splendeurs de l’Est. Kislev était attirante et n’avait pas à rougir des villes de chez nous. Une architecture riche mais changeante, de nouvelles senteurs sur les marchés, des plats à découvrir, des filles d’une blondeur impressionnante, grande et fine, aux poitrines superbes et aux jambes interminables, avec des croupes….

Hum, hum, je m’égare de nouveau… Les habitants de Kislev avaient leur propre langue ce qui nous rendit incompréhensibles en ville et les citadins parlant le Reikspiel n’était pas aussi fréquents que ce à quoi je m’attendais. De toute façon, en tant qu’ambassadeur, on fut très vite reçu au Palais du Tsar Radii Bokka dit le « Petit père des peuples ».

D’ailleurs lors de cette unique réception, il ne s’adressa jamais directement à nos personnes. Un de ces conseillers, Vladimir Ilych Bogdanov, fut le relais entre nos personnes.

L’entrevue fut rapide. Visiblement nous n’avions pas notre mot à dire. Le Graf et son fils nous avaient envoyé jusqu’ici pour louer nos services et pas pour discuter les ordres. Ces derniers étaient d’un intérêt limité à première vue. Il s’agissait de se rendre encore plus vers l’Est, de franchir les montagnes pour aller jusqu’à la cité de Chernozavtra une sorte de poste frontière avec qui la capitale n’avait plus vraiment de contact. Cependant ils souhaitaient qu’on délivre un message à un certain Gurthgano Gorthaudh. Ce nom à consonance elfe intrigua nos deux soeurettes puisque cela se traduisait par « le je sais pas quoi de la Mort qui tue ». En gros. Un putain de nom elfe bien compliqué juste pour se la péter… Le message aussi montra peu d’intérêt. « Sulring Durgul est impliqué à Bolgasgrad ». Là aussi le nom était à consonance elfe. De toute façon, c’est en agissant que nous en apprendrions plus. Même si nous feintions les bons samaritains, je savais qu’on tirerait toujours notre épingle du jeu. Chaque chose en son temps…

Le voyage s’avéra délicat. L’hiver commençait à pointer le bout de son nez et dans cette région il devait être sans pitié. Les cols des montagnes étaient déjà enneigés et les routes peu dégagées. Nous finîmes notre escapade en utilisant des chars à voiles sur les rivières gelées. Cela s’avéra rapide, très pratique et très novateur comme moyen de locomotion. Dans mon pays, Le Reik ne gelait jamais mais dans ces terres cela semblait le meilleur moyen pour lutter contre la glaciation des cours d’eaux.

Les derniers jours se firent à pieds. Bien sûr, un pisteur nommé Piotr nous accompagnait depuis Kislev, aux ordres de Bogdanov. C’était un bon gars au physique ingrat mais d’une robustesse classique à ces gens là. Il était d’agréable compagnie mais ne baragouinait quasiment jamais et encore moins dans notre langue. Evidemment Heinrich passait pas mal de temps avec lui. Entre chasseurs de lapins un peu benêts, la communication devait être simplifiée.

Nous quittions les sous bois, lorsque Piotr nous fit comprendre que nous approchions de la bourgade. Soudain des hurlements de loups se firent entendre. Au loin quelques fumées s’élevaient. Nous étions arrivé au bord d’un plateau assez herbeux. A première vue nous approchions d’un grand campement. A l’étonnement lu sur le visage de Piotr, je compris rapidement qu’il y allait avoir de l’inattendu.

Et ce fut le cas. Une patrouille de Gobelins nous tomba sur le paletot. Bien trop nombreux pour tenter quoique ce soit. Certains montaient même de grands loups. Nous fûmes déclarés prisonnier et amenés à leurs campements. C’est là que nous comprîmes la situation tordue et bordélique dans laquelle on s’était fourré. Et même avec ce froid de canard, je me serais bien passé de tout ceci.

Suivez moi bien ! Chernozavtra avait pour sympathique situation le fait de se trouver sur une île en plein milieu d’une large rivière encore non gelée, la Zapadryeka. La ville était actuellement assiégée par des Dolgans, une peuplade du coin, qui avait établi leurs camps sur l’îlot même, encerclant les fortifications de la ville. Et de notre côté sur la berge d’où partait l’unique gué pour rejoindre les lieux, les Gobelins avaient décidé de poser leurs bardas pour créer un blocus envers les Dolgans. Cela durait depuis quelques jours visiblement. Bien tordu n’est ce pas ? Mais le pire était à venir…

Heureusement pour nous les Verdâtres ne nous mirent pas immédiatement la tête sur le billot. Hablo, leur chef, désira nous rencontrer et passer un marché avec nous. Il nous laissait franchir le gué en contrepartie d’apporter un message au chef Dolgan. Un truc qui signifiait : «Vous êtes foutus ! Filez nous vos bisons, sinon on vous bute ! » Bon bref pas dans la finesse. J’avoue qu’il ne fallait pas me le demander deux fois. J’en avais rien à foutre des problèmes de communications entre ces tarés de Gobelins et les Dolgans qui n’allaient certainement pas se laisser faire. Moi ce que je voyais, c’est que on évitait de finir en bouillon et qu’on avait la possibilité d’emprunter le gué. Bon le marché n’empêcha pas certains grandes gueules vertes de nous cracher sur les pompes mais Khorint leur fit rapidement comprendre qu’ils fallaient pas trop faire chier non plus. Un lieutenant d’Hablo n’eut même pas le temps de retenir la leçon.

Dés que nous traversâmes le gué, quelques Dolgans bien armés vinrent à notre rencontre. Leur campement encerclait les remparts de Chernozavtra. De nombreuses tentes étaient dressées, j’appris plus tard qu’ils appelaient cette habitation « Yourte », et sur le bord Ouest de l’île, un parc de chevaux et de bisons avait été aménagé. A première vue, les chevaux étaient de sacrées belles bêtes d’une race que je ne connaissais pas. Très rapidement, à la vue de notre explication, les Dolgans comprirent que nous n’étions pas dangereux. Le message Gobelin fut même brûlé par leur chef.

Une sorte de shaman qui parlait bien notre langue s’improvisa traducteur. Il se nommait Dafa. Il nous expliqua que le siège de la ville durait depuis belle lurette mais qu’un terrible maléfice empêchait les Dolgans de reprendre ce lieu sacré pour leurs traditions. Pourtant rien ne semblait si compliqué que cela, sans être un maître de poliorcétique. Mais les Dolgans nous montrèrent rapidement la difficulté. Ils nous accompagnèrent près des remparts.

Et soudain apparut à leurs sommets une bande de morts vivants, bien décharnés. Un putain de frisson me parcourut immédiatement l’échine. Des putains de morts vivants ! Et moi qui en avait une trouille bleue, il manquait plus que foutrement ça ! Je vous l’avais bien dit, que le pire était encore à venir…

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