Les PJs sont des personnages importants. Ils sont au centre de l'histoire, ils sont ceux par qui vos joueurs interagissent avec le monde... Exploiter le potentiel ainsi offert par les PJs est bien souvent un élément clef d'une campagne réussie. Il convient pour cela de faire attention à différents éléments : l'histoire des personnages, leurs avantages et leurs défauts.

L'historique

Il s'agit de la première pierre du personnage. Qui est-il, comment en est-il arrivé là ? Je pense que tous les MJs ici sont convaincus de son utilité.

Cependant, cela va bien plus loin que le passé du personnage. L'historique définit aussi des buts ou des éléments qui influenceront énormément l'avenir du personnage. Ces éléments sont majeurs : si le joueur les a inclus, c'est qu'il a derrière la tête une envie de les développer.

Exemple : "Bob est orphelin. La seule trace qu'il a de ses parents est une petite amulette qu'il porte toujours au cou depuis." Ce genre de passage indique clairement que le joueur de Bob souhaite développer la vérité derrière l'origine de son personnage.

Ces éléments pourront être développés au détour d'un scénario (un ancien esclave qui se retrouve face à un réseau esclavagiste) ou pourront servir de base à un scénario (Une piste lance Bob, et ses compagnons, à la recherche des origines de l'amulette). Dans tous les cas, ils auront l'intérêt de bien plus impliquer les joueurs dans la partie... "Maintenant, c'est personnel."

Bien entendu, il faut veiller à ne pas mettre un personnage sur le devant de la scène par rapport aux autres... Mais qui sait, peut-être que les personnages ont quelque chose qui les relie et qu'ils ignorent ?

Les avantages

Un personnage a toujours un concept derrière lui ou tout du moins un domaine dans lequel il est censé exceller. Bien entendu, cet avantage le sert souvent au quotidien mais il est souvent intéressant d'aller plus loin.

A quoi bon être un Jedi, si Luke n'avait pas eu besoin d'utiliser la Force pour détruire l'Etoile Noire ? Le joueur a dépensé des points (ou autre selon le système de création) pour atteindre ce niveau de maîtrise, et il a bien le droit d'en profiter... Il espère même pouvoir le faire.

Ceci n'exclue pas les challenges. Nicky Larson a beau être un tireur hors pair, chaque épisode est pour lui une occasion de briller en dépassant ses propres limites. N'hésitez donc pas à placer des situations extrêmes où la maîtrise hors du commun du personnage lui permettra de s'en tirer...

Mais ne tombez pas dans l'excès inverse. Beaucoup de MJs, cherchant à offrir un challenge aux PJs (ou s'enfermant parfois dans l'idée que le MJ doit s'opposer aux PJs), procèdent à une véritable course à l'armement complètement absurde. Si un des personnages est le maître du katana, il n'y a aucun raison pour que le moindre combattant soit un expert dans le domaine.

Si vous voulez offrir un challenge, mettez le soit dans une situation qui le poussera à se surpasser (mais pas forcément contre un ennemi meilleur que lui, un simple équivalent risque de déjà donner du fil à retordre sans le frustrer) soit dans une situation dans laquelle il doit faire preuve d'originalité (le maître du katana risque d'être pris au dépourvu face à un sniper). Encore une fois, ne cherchez pas systématiquement à contrer la sur-puissance du personnage. Il a payé pour être le meilleur, il a le droit de l'être.

Les défauts

Tout personnage a ses défauts, ses erreurs et ses échecs... en particulier dans le jeu de rôle, où les dés (et non le scénariste) dictent la réussite d'une action. Le tout est de savoir ménager la face des personnages et, derrière eux, des joueurs.

Au mieux, le défaut est une invitation à se surpasser : si Indiana Jones a la phobie des serpents, c'est bien pour rendre plus dramatique le moment où il va devoir la surpasser pour se sortir d'un piège. De la même manière, si le héros se fait attraper et tabasser, c'est pour que sa vengeance, lorsqu'il retrouve sa liberté, n'en soit que plus agréable. Le défaut ou l'échec devient alors quelque chose de plus ou moins héroïque voire positif.

En dehors de ceci, le défaut et l'échec est aussi un moyen d'humaniser le personnage. Au cinéma ou dans la littérature, un personnage "parfait" qui sait tout et réussit tout devient vite exaspérant. Ce n'est pas exactement pareil pour le PJ. Le joueur s'identifie au personnage et, bien souvent, il veut le voir tout réussir avec classe et talent. _ Mais si vous laissez un PJ être ainsi surpuissant, vous remarquerez très vite que non seulement ça manque d'intérêt (aucun challenge) mais aussi que le personnage n'a aucune profondeur. Au final, le joueur risque de ne plus beaucoup s'y intéresser ou le considérera uniquement comme un tas de gros chiffres. _ A l'inverse, un personnage avec ses défauts et ses échecs en devient plus humain, et le joueur aura plus de facilité à s'y identifier et à l'appréhender.

Le tout est de ne pas rendre l'échec désagréable ou frustrant, le personnage ne doit pas perdre la face. Évitez d'humilier le PJ lors d'un échec, même critique. L'échec doit être perçu comme un challenge non comme une désagréable fatalité.

Pour faire plus simple, nous allons prendre un petit exemple qui illustrera l'ensemble des points mentionnés plus haut :

Bob est un personnage énigmatique. Drapé dans une grande cape, il surveille toujours la situation de loin, d'un oeil détaché. Son savoir parait immense et le moindre de ses actes semble réfléchi et étudié, même en plein milieu d'une violente mêlée. _ Vous voyez le personnage. On sent ce que le joueur cherche à jouer, et ce genre de perso se retrouve assez couramment des les films.

Malheureusement, ce type de personnage est souvent assez "plat". Un personnage froid, mystérieux et distant ne fait pas très humain, n'a pas forcément beaucoup de profondeur et il peut alors être difficile pour le joueur de s'y identifier. C'est là que les défauts prennent leur importance : Pour gagner des points de création, Bob à la phobie des rats. Un jour, Bob, en train d'assurer la garde d'un passage souterrain qui risque d'être attaqué par des ennemis, voit passer un rat. Il loupe son jet de volonté et est pris de panique. Joe, un autre membre de l'équipe, descend à ce moment là Attention alors à la manière d'intégrer ça à la partie. _ Mauvais exemple : "Tu vois Bob, en plein milieu de la pièce, en train de sauter dans tous les sens en hurlant "ah au secours ! Un rat énorme ! là ! là ! Tue-le ! Tue-le !" Là, vous humiliez complètement le personnage qui, en plus, se retrouve complètement dénaturé. _ Bon exemple : "Tu vois Bob, le dos collé contre un mur. Ses yeux sont fixés vers une caisse dans un coin de la pièce. Sa respiration est rapide, et une goutte du sueur descend le long de ses joues. Ton arrivée fait fuir un rat caché derrière la caisse. Bob semble alors se calmer. Bob aurait-il peur des rats ? A en voir son regard, c'est sûrement quelque chose de plus profond que cela." Là, vous maintenez l'idée du personnage intacte tout en laissant transparaitre sa faiblesse. Vous approfondissez même le personnage en donnant plus de poids à l'origine de la phobie. Bob devient plus humain.

Pour les échecs, l'idée est encore la même : Bob va voler à la rescousse de ses amis, en pleine bataille. Bob, maître de l'acrobatie et qui sait soigner ses entrées, compte sauter du toit duquel il observe la scène. Il fait un échec critique _ Mauvais exemple : : "Tu te prends les pieds dans ta cape, tu trébuches, et tu t'éclates comme une merde sur le sol, avec ta cape qui est restée accrochée en haut du mur." _ Bon exemple : : "Le rebord du mur n'est pas aussi solide que prévu. Le sentant se dérober sous tes pieds, tu te contentes de te laisser tomber du haut du mur. Tu n'as pas vraiment eu le temps de préparer ta chute et tu loupes la réception, tu sens ton pied droit se tordre sous toi. Tu te retrouves un genou à terre, avec une vive douleur au pied." _ Dans les deux cas, Bob échoue et subit les effets de son échec critique (des dégâts) mais dans le deuxième, il reste digne. Pour les observateurs extérieurs, il s'est contenté de se laisser glisser le long du mur et est arrivé un genou à terre (la pose assez classique de fin de chute quoi).

Conclusion

Impliquez les personnages via leur histoire, leurs buts et leurs passions, faites les briller via leurs talents, rendez les humains par leurs défauts et sachez les respecter dans leurs échecs. Si vous suivez ces conseils, vous devriez éviter bon nombre de récriminations.

Bien entendu, tout dépend aussi du jeu et de l'ambiance que veut mettre le MJ, mais y compris dans des jeux où les PJs ne sont pas censés être des héros, il convient de ménager la face des PJ (et des joueurs qui vont derrière) pour que les joueurs apprécient l'histoire.

Tout ceci demande de bien connaître les personnages, pour vous adapter en conséquence, mais prenez garde à ne pas trop vite les cataloguer ou les enfermer dans l'idée que vous vous en faites. Vous risquez alors de dénaturer le personnage en cherchant à respecter le concept.

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